Dans le tissu paisible de Saintes, L’Iøde distille une identité bien à part: celle d’une table qui a su séduire le guide Michelin avec un Bib Gourmand, en se consacrant à une cuisine contemporaine centrée sur l’essentiel. Le nom même du restaurant évoque l’air marin, et ce n’est pas une coïncidence. On sent dans chaque assiette un rapport assumé à la côte atlantique, une sensibilité au produit iodé, sans jamais tomber dans le pastiche ou l’effet attendu. L’espace, sobre et lumineux, se distingue par une décoration maîtrisée, sans surcharge décorative. Quelques touches naturelles — pierre, bois, lin brut — rappellent l’environnement charentais, tandis que la disposition des tables et la clarté du lieu laissent place à une certaine fluidité. Rien ne détourne l’attention de ce qui est servi : une cuisine précise, directe, et pourtant pleine de nuances. Dans l’assiette, ce sont les produits locaux qui parlent. Les poissons de criée y occupent une place de choix, souvent cuits à la minute, parfois juste snackés pour préserver leur moelleux, accompagnés de bouillons clairs ou de jus courts. Les légumes, choisis pour leur fraîcheur, ne sont jamais accessoires. Ils apparaissent travaillés dans leur intégrité — crus, fermentés, rôtis — selon une logique de contraste de textures et de respect des saveurs premières. Le chef, Benjamin Girard, discret mais constant dans son approche, propose une lecture honnête de la cuisine de saison. Son style pourrait être défini comme minimaliste dans l’intention, mais maximal dans l’expression des goûts. Il évite les effets de manche. Chaque composition est resserrée, mesurée, construite sur trois ou quatre éléments en interaction. L’Iøde ne s’impose pas, il s’inscrit. Dans son territoire, dans son époque, dans une certaine idée de la gastronomie quotidienne qui ne renonce ni à la justesse ni à la poésie. Et s’il y a bien un mot qui résume ce que l’on ressent en quittant cette adresse, c’est une forme de clarté : celle des goûts, des choix assumés, d’un propos culinaire sans détour.