À l’abri du tumulte du Quartier Latin, Alfi’s s’exprime dans une retenue calculée, loin des codes tapageurs de la scène gastronomique parisienne. Dès l’entrée, la fraîcheur minérale des vieilles pierres accompagne le regard, adoucie par la chaleur discrète du bois et cette lumière naturelle qui coule du dehors pour sculpter chaque recoin. Ici, rien d’ostentatoire : les tables sans nappe, les assises épurées, tout concourt à mettre au premier plan ce qui vient, silencieusement, de la cuisine ouverte.
Dans une gestuelle soignée, les assiettes arrivent, dévoilant une cuisine qui puise sans frontières dans l’Europe, sans pour autant s’y enfermer. L’approche privilégie une écriture claire et contemporaine, souvent portée par des légumes éclatants dont la fraîcheur saute aux yeux bien avant le palais. L’influence du terroir se devine, sans jamais peser ; une carotte, simplement déposée, côtoie une émulsion légère, presque éthérée, attendant la surprise de l’accord.
Le chef — dont le nom reste en retrait — embrasse une philosophie culinaire qui préfère le dialogue aux certitudes. Plutôt qu’imposer une signature, il cherche la justesse, l’équilibre ténu entre acidité, douceur et texture. Les produits de saison racontent chaque jour un nouveau récit, conçus sur l’instant, éclipsant la routine d’une carte figée.
On retrouve cette justesse jusque dans les dressages, à la fois précis et vivants, évitant tout maniérisme superflu. Chaque plat se contente d’être lisible, révélant une saveur nette, sans masque. Alfi’s perpétue ainsi une vision lucide de la modernité : préférant la suggestion à l’évidence, invitant à redécouvrir l’évidence d’un goût sans décor, juste l’essentiel.