Chistophe Raoux, c'est le genre de personne qui vous met tout de suite à l'aise. Poignée de mains chaleureuse, sourire communicatif... Si le chef des cuisines de The Peninsula Paris instaure un climat de confiance avec ses clients, il en fait de même avec son équipe. "Tous les matins, je fais le tour de tous les services pour dire bonjour à tout le monde. Ca crée une bonne ambiance et ensuite, quand vous demandez un service à quelqu'un, il le fait naturellement", nous explique-t-il. "Pour moi, ce n'est pas du management mais une vraie philosophie."
Cette philosophie, Christophe Raoux l'a acquise au fil de ses expériences, à commencer par celle de commis de cuisine auprès de Guy Legay à l'hôtel Ritz Paris, de cuisiner chez Benoît Guichard au restaurant Le Jamin ou encore son poste chez Lenôtre. Mais les cinq années qui l'ont certainement le plus marqué sont celles passées auprès d'Alain Ducasse. Pendant cinq ans, le jeune chef fait le tour du monde avec son mentor, qui lui enseigne la rigueur et l'ouverture sur les autres cultures. "Il m'a donné énormément", se rappelle Christophe Raoux. "Parfois, je pouvais aller dans son bureau à 18h et n'en ressortir qu'à 22h30 tant il était intarissable sur la cuisine. C'est un vrai passionné !"
Depuis fin 2016, le chef d'origine vendéenne, Meilleur Ouvrier de France 2015, est à la tête des cuisines de The Peninsula Paris, tant pour le restaurant gastronomique L'Oiseau Blanc que la brasserie Le Lobby ou le restaurant chinois le Lili.
Rencontre avec un chef généreux.
Pourquoi avoir accepté cette place de chef au The Peninsula Paris ? C'était avant tout par challenge. J'ai souvent travaillé dans de grands hôtels mais pas dans des palaces et c'était une très belle opportunité. De plus, j'ai trouvé l'endroit très beau et j'ai eu un bon feeling avec le directeur de l'époque et la RH. Le feeling, c'est très important... J'ai besoin de travailler en confiance !
On m'a laissé complètement carte blanche mais bien sûr, il y a eu un temps d'adaptation, on ne peut pas faire n'importe quoi, il faut apprendre les codes et que les équipes apprennent à me connaître. Mais petit à petit ça a payé !

Comment définiriez-vous votre cuisine ? Je dirais que je fais une "cuisine de cuisinier", une cuisine de l'instant et de saison. Et quand je cuisine, j'aime transmettre. Beaucoup trop d'anciens chefs sont partis en emportant leurs secrets avec eux ce que je trouve bien dommage.
Comment choisissez-vous les fournisseurs avec lesquels vous travaillez ? Je choisis d'abord un beau produit mais je reste fidèle à un producteur aussi par affinité. Récemment j'étais avec mon fournisseur qui fait de l'agneau dans le Pays Basque. Nous sommes partis à trois, avec mon fournisseur de jambon, à 6h du matin dans les montagnes basques. Arrivés en haut, on a assisté à un magnifique levé de soleil... On dominait les montagnes noires, on a ramené les brebis... C'était un moment magique ! Ensuite, nous sommes allés chez sa maman dans une vieille maison basque. Elle nous a fait une omelette aux cèpes d'exception et un gâteau basque comme j'en ai jamais mangé. C'était extraordinaire !
Je suis également très fidèle à Pierre qui fait des serres en Eure-et-Loir, près de Maintenon. Grâce à lui, j'ai des salades qui ont un goût de salade, des tomates qui ont goût de tomate... Ca paraît bête mais c'est tellement rare aujourd'hui.
Quel est le plat signature du restaurant gastronomique L'Oiseau Blanc ? Le turbot surmonté de croûtons et couteaux, avec un crémeux de romaine, poêlée de champignons de saison, salicorne et beurre blanc. On a essayé de l'enlever de la carte mais les clients le réclamaient.

Comment travaillez-vous avec Dominique Costa, le pâtissier de la maison ? Cela fait dix ans que l'on travaille ensemble. C'est un garçon extrêmement gentil, avec beaucoup de talent et qui s'est affiné au fil des années. Il a désucré ses desserts et travaille aussi en fonction des saisons. Il me fait goûter ses desserts, je lui fais goûter mes plats et on essaye de trouver une harmonie à tout ça.
Décrocher une étoile au Guide Michel fait partie de vos objectifs ? Oui, mais ça n'est pas un objectif personnel. Je pense surtout que ça serait une superbe reconnaissance pour mon équipe. Ce sont des vrais bosseurs, tant en cuisine qu'en salle, et ils seraient tellement fiers de décrocher une étoilé ! Mais la direction ne nous met absolument pas la pression là-dessus. Le principal c'est que nos clients soient contents.
Quel serait le plus beau compliment que l'on pourrait faire sur votre cuisine ? Le plus beau compliment serait de dire que ma cuisine est sincère, sans triche. A chaque service on met notre âme et quand nos clients sont contents c'est ce qui nous touche le plus.
Si vous pouviez faire un dîner à 4 mains avec un autre chef, qui choisiriez-vous ? J'en choisirais plusieurs ! Tout d'abord Jacques Maximim qui est un chef fabuleux... Une véritable encyclopédie ! Mais aussi Guy Legay, mon ancien chef au Ritz, et bien sûr Alain Ducasse.
J'aimerais aussi beaucoup faire un 6 mains avec Christophe Bacquié et Eric Pras, avec qui j'ai fait l'armée.
Enfin, si je pouvais remonter le temps, j'aimerais beaucoup cuisiner avec Benoit Violier. C'était un ami.
Que trouve-t-on dans vos placards au quotidien ? On trouve toujours un bout de jambon de mon copain Pierre, un citron car j'adore les agrumes, un peu de poutargue, du gingembre, un vieux vinaigre balsamique, une bonne huile d'olive et de la fleur de sel.
Quels sont vos projets pour les mois à venir ? A la rentrée j'aimerais revoir un peu le concept du Lobby. C'est un restaurant qui marche très bien le midi mais qui a du mal à se remplir le soir. Alors dès septembre on y proposera une carte de crustacés car aucun restaurant aux alentours n'a cette offre. J'aimerais aussi agrandir le potager car aujourd'hui nous n'avons que des herbes aromatiques et j'aimerais avoir des légumes.
Où ? The Peninsula Paris, 19 avenue Kléber, 75016 Paris.