C'est une première en France : lundi 18 janvier 2021, le Guide Michelin a décerné une étoile à un restaurant vegan, ONA (Origine non animale) situé à Arès, dans le Bassin d'Arcachon.
Palet de chou-fleur rôti, curcuma frais, huile de courge, tartare d'algues, tuile de sarrasin et consommé citronnelle-safran ; Chaud/froid d'asperge, gnocchi de patates douces, vinaigrette pamplemousse et poivre de Timut... Autant d'intitulés qui ont convaincu le guide rouge, qui ne tarit pas d'éloges sur la cuisine de Claire Vallée. "Les assiettes, esthétiques, sont finement travaillées, avec de belles déclinaisons sur les fruits et légumes [...] Un savoureux voyage dans une gastronomie inattendue, qui s'exprime dans toute sa complexité le soir, autour d'un menu en 7 temps. Cette table originale et créative mérite toute votre attention."
L'établissement, ouvert à l'automne 2016, a pourtant bien failli ne jamais voir le jour. "À l'époque, les banques m'ont toutes fermé les portes. On me disait que dans une région où l'on mangeait beaucoup d'huîtres et de foie gras, un restaurant vegan ne marcherait pas. Arès est une petite ville, j'étais autodidacte, personne ne me connaissait et on n'avait pas encore beaucoup de recul sur le veganisme... Bref, ça a été très compliqué", se souvient Claire Vallée.
Pas question de baisser les bras pour autant ! Très vite, la cheffe ouvre une cagnotte en ligne qui lui permet de récolter les fonds suffisants pour se lancer et se fait également aider par une banque éthique, la Nef. Pour finaliser les travaux de son local, une ancienne pizzeria, Claire Vallée lance un appel sur les réseaux sociaux et à sa plus grande surprise, de nombreuses personnes répondent présentes. "J'ai vu tous les corps de métiers défiler pour venir m'aider ! Ces mêmes personnes ont été mes premiers clients", se souvient-elle.
Un voyage en Thaïlande déterminant
Claire Vallée, titulaire d'un doctorat en archéologie, n'était pas destinée à devenir cheffe. Habituée au service en salle en parallèle de ses études, la jeune femme est partie un été en Suisse pour faire une saison. "Finalement, je suis restée huit ans", s'amuse-t-elle. "Très vite, on m'a proposé une place en pâtisserie alors que je n'en avais jamais fait. Un autre restaurant m'a offert une place en cuisine et au bout d'un moment, le chef est parti et mon employeur m'a demandé de prendre sa place. J'estimais que je n'avais pas les compétences pour, mais il m'a dit que j'en étais capable et que si je n'acceptais pas, je devais partir !", se souvient Claire Vallée.
La jeune femme voyage ensuite pendant un an en Thaïlande, où elle découvre la cuisine végétale, les herbes, les épices, les plantes, mais aussi le tofu et le seitan. "Il n'y a pas de produits laitiers là-bas et très peu de viande. Cette cuisine a commencé à vraiment me passionner et les possibilités sont infinies. Vous saviez qu'il existe plus de 200 variétés de tomates par exemple ? C'est incroyable !"
Après cette expérience, Claire Vallée rentre en France et travaille pendant deux ans dans un restaurant où elle cuisine la viande et le poisson alors qu'en consomme plus. "J'étais vraiment écoeurée et je me rendais compte au fur et à mesure de mes créations que la viande était reléguée au rang de garniture. C'est ce qui m'a poussée à ouvrir mon propre restaurant."
Aujourd'hui, la jeune quarantenaire exprime pleinement sa créativité chez ONA qui, en plus d'avoir reçu sa première étoile Michelin, a également été récompensé d'une étoile verte pour sa démarche écolo. "On travaille avec les producteurs bio, on a un système de composte, une énergie verte... Les chefs ont une vraie responsabilité sur ces sujets, au-delà de l'assiette", soutient-elle.
Vous hésitez encore à pousser la porte d'ONA ? N'ayez crainte : 95% de sa clientèle n'est pas vegan et pourtant, tous les curieux et gastronomes qui s'y sont attablés se sont régalé. Vivement la réouverture des restaurants !
Où ? ONA, 3 bis rue Sophie et Paul Wallerstein, Arès.