Discretement installé au 35 rue Edgar-Quinet, à La Ciotat (13600), en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Couleurs de Shimatani n’attire pas l’œil par une enseigne tapageuse, mais par une atmosphère contenue, presque méditative, qui semble en harmonie avec une certaine idée de la cuisine comme art silencieux. Distingué d'une étoile au guide Michelin, ce lieu ne s’impose pas par l’apparat, mais plutôt par la justesse de son propos gastronomique, maîtrisé et singulier. En poussant la porte, le contraste avec l’extérieur est saisissant. L’espace est épuré, sans froideur, où chaque élément du décor semble choisi pour sa résonance : bois clair, lignes sobres, lumière diffuse. Tout concourt à faire oublier l’agitation environnante et invite à une forme de contemplation sensorielle. Ce dépouillement visuel met en relief ce qui compte réellement ici : l’assiette. La cuisine proposée puise clairement ses racines dans un dialogue entre traditions japonaises et influences méditerranéennes. Si le nom évoque un héritage nippon, les produits, eux, viennent du terroir provençal, avec une préférence pour les poissons de la côte, les agrumes locaux, ou encore des légumes d’une fraîcheur presque brute. Le chef, dont le nom reste volontairement discret dans la communication du lieu, conçoit ses plats comme des compositions chromatiques autant que gustatives. Il évoquerait son style comme une recherche constante d’équilibre entre tension et douceur. La présentation, minutieuse sans affectation, offre souvent un jeu de textures et de couleurs qui rappelle l'esthétique du kaiseki, tout en demeurant ancrée dans une saisonnalité stricte. Chaque plat semble raconter un fragment d’un paysage imaginaire, entre calanques abruptes et sous-bois ombragés. Pas de démonstration technique gratuite ici, mais une retenue maîtrisée, où le silence entre deux bouchées devient aussi important que le goût lui-même. Le restaurant ne revendique pas une identité figée. Il semble plutôt se situer dans une recherche permanente, une sorte de laboratoire poétique où la mémoire gustative est sans cesse revisitée. À La Ciotat, loin des circuits convenus, Couleurs de Shimatani incarne une approche rare de la gastronomie : exigeante, intérieure, presque contemplative. Et c’est peut-être là, dans cette discrétion assumée, que réside sa singularité.