Voici venu le moment de l'année où nous vous dévoilons nos prédictions en matière de tendances culinaires pour l'année 2020. Avec l'arrivée d'une nouvelle décennie, dix années de tendances - et parfois d'échecs - derrière nous, intéressons nous à ce que nous allons manger, voir et entendre en 2020.
Vous pouvez également jeter un coup d'oeil à nos prédictions de l'an passé pour voir où nous avions tort ou raison.
Ryan King
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Photo : Noma Guide de la Fermentation
On vous entend d'ici : "Fermentation?... Encore ?" Eh bien oui. Mais il ne s'agit pas du classique kimchi ou miso. Nous parlons ici d'un tout autre niveau concernant ce processus ancestral. Dans nos tendances 2019, nous avions prévu l'effet Noma : comment la réouverture du restaurant danois de Rene Redzepi aurait un impact à travers l'industrie en diffusant et semant ses idées. La grande étape franchie par le chef est l'acquisition d'un tout nouveau laboratoire de fermentation. Alors certes, la fermentation fait partie des tendances depuis plusieurs années cependant, avec autant de possibilités et de pistes encore non explorées, la fermentation reste une source de découverte incroyable. Nous nous attendons à ce que de plus en plus de chefs aillent sur le terrain de la fermentation en cuisine. Les récentes démonstrations et publications du Noma ont également prouvé que cette technique était tout à fait réalisable à la maison.
Peu d'alcool
Crédit : Native Bar
L'une de nos correspondantes, Gabriela Renteria, a récemment publié un article sur la montée des cocktails faibles en alcool. Ces boissons sont crées pour les gens qui souhaitent les saveurs que seul l'alcool peut offrir, sans les méfaits habituellement associés à l'alcool. Il s'agit également d'une tendance suivie par les consommateurs soucieux de leur santé qui souhaitent retrouver le côté fun des bars sans les calories.
Diana Lee
Les céréales et farines anciennes
Photo Stockfood
Nous espérons voir plus de pâtissiers en herbe expérimenter de nouvelles variétés de céréales, comme le seigle et l'orge, et d'anciens grains comme le teff, le blé dur et l'épeautre. Les boulangeries sont de plus en plus nombreuses à utiliser ces anciennes variétés de grains, qui produisent un gluten de différente qualité, plus digeste que celui du blé moderne.
Les pâtes fraîches
Après des années de #cleaneating, les millenials se dirigent vers le #choosepasta. La nourriture italienne était d'ailleurs la cuisine préférée des millenials selon une étude publiée en 2019, avec les pâtes en haut de la liste. Ceci s'explique par de nombreuses raisons, et pas seulement par le fait que les pâtes soient très Instagrammable. La popularité des pâtes croit à grande vitesse dans des capitales telles que Londres mais aussi Paris. Les foodies en mangent aussi bien au restaurant que chez eux et apprennent même à confectionner leurs propres pâtes. Peu chères, délicieuses et régressive... Les pâtes ont tout bon ! 2020 sera l'année des pâtes faites maison parsemées de fromage - préparez-vous au grand retour du Mac n Cheese !
Hugo McCafferty
Cuisines fantômes
La livraison à domicile a fait l'effet d'un tremblement de terre sur la planète food. Ce phénomène a créé des restaurants fantômes où les chefs ne servent plus leurs clients en salle mais directement chez eux. En 2020, les cuisines fantômes devraient encore grandir grâce à la convergence des industries de la technologie et de l'agroalimentaire. L'industrie de la livraison aurait même le potentiel de passer de 35 milliards de dollar à 365 milliards d'ici 2030.
Mais qu'est-ce qu'une cuisine fantôme ? Il s'agit d'une cuisine "ressource" que les chefs ou même les particuliers peuvent louer à l'heure pour préparer les commandes à livrer. Certains experts prédisent même l'émergence de chaîne de restaurants ne disposant pas de leur propre cuisine. Certaines grosses entreprises misent déjà sur ces cuisines fantômes comme le fondateur d'Uber et l'ancien CEO de Cloudkitchens Travis Kalanick. Certains pays où la livraison est en pleine croissance, comme l'Inde ou la Chine, sont des terrains fertiles pour les cuisines fantômes. et de nombreux restaurateurs et chefs ont les connaissances et les compétences culinaires, mais n'ont pas les fonds pour des locaux. Le génie de la livraison de nourriture est déjà sorti de la bouteille et ne va pas y retourner de si tôt, et les cuisines fantômes semblent être une conséquence inévitable de cela.
L'agriculture régénératrice
Au-delà dy «durable» et du «biologique», il y a l'agriculture régénérative, un système agricole qui enrichit le sol, augmente la biodiversité et améliore la gestion des bassins versants. Basé sur le travail révolutionnaire de Maynard Murray dans les années 80, qui a vu l'émergence de pratiques de semis direct et d'autres innovations qui ont ajouté des nutriments à la couche arable, comme le paillage (étouffer les mauvaises herbes sur le sol pour encourager l'absorption des nutriments).
«Durable» est une condition préalable pour les chefs qui recherchent des ingrédients exceptionnels produits localement, mais une plus grande urgence, provoquée par des statistiques horribles sur le changement climatique, verra les consommateurs conscients exiger des ingrédients qui à l'empreinte carbone positive, plutôt que neutre. Les ingrédients qui sont cultivés d'une manière qui emprisonne réellement le carbone dans le sol et la biomasse terrestre peuvent représenter la réalisation de chaînes d'approvisionnement totalement cohérentes et alignées. Plus que de la ferme à la fourchette, l’agriculture régénérative peut autonomiser chaque point de la chaîne d’approvisionnement, créant une «économie agricole circulaire» et les chefs peuvent jouer un rôle essentiel pour catalyser la prochaine phase de la durabilité.
Holly Cole
Les aliments fonctionnels
Les aliments fonctionnels sont un domaine qui devrait beaucoup développer en 2020. Les consommateurs conscients font de plus en plus de choix alimentaires plus éclairés, que ce soit en magasin ou en restaurant et l'impact que certains aliments ont sur le corps est quelque chose dont les acheteurs sont maintenant plus conscients que jamais.
Les aliments fermentés, les aliments rouges, les aliments violets, le chocolat, les épices comme le curcuma, les champignons fonctionnels, les algues, la spiruline, les germes et les céréales anciennes ne sont que quelques-uns des aliments que nous voyons davantage dans les menus et dans les allées des supermarchés pour leurs avantages fonctionnels. Alors que les gouvernements ont jusqu'à présent encouragé un régime unique «méditerranéen» ou la pyramide alimentaire classique d'une alimentation saine, l'avenir semble plus sur-mesure pour l'individu. Nous envisageons un avenir où le corps médical reconnaît qu'une bonne alimentation doit être «individualisée».
La «nutrigénomique», ou l'idée qu'un test ADN peut fournir des indications sur les aliments que nous devons manger, et des recommandations diététiques personnalisées sont une réalité. Nous prévoyons une croissance de la consommation consciente, depuis les bases de l'achat et de la cuisson des aliments fonctionnels jusqu'à l'avenir de l'engagement avec des coachs de santé virtuels et de l'utilisation de l'IA pour adapter un régime personnalisé basé sur l'ADN et le type de corps.
Le gapillage alimentaire
Photo : Masami Naruo
À l'heure actuelle, nous sommes tous conscients de la menace de la sécurité alimentaire mondiale avec une échéance imminente pour 2050 et 9,8 milliards de personnes à nourrir. Mais la gravité du gaspillage alimentaire mondial est tout aussi stupéfiante: des aliments produits, un tiers de la nourriture mondiale est perdu ou gaspillé chaque année, soit 1,3 milliard de tonnes, évalué à 750 milliards de dollars.
Ce problème ne disparaîtra pas de sitôt, mais des progrès sont en cours avec le gouvernement et des chefs de renom, comme Massimo Bottura, utilisant leur voix pour mener des campagnes. De la lutte contre les politiques d'achat des supermarchés à la préparation de pelures de pommes de terre délicieuses. Et, avec une crise alimentaire mondiale potentielle en cours, c'est un mouvement qui ne peut que gagner du terrain.
Jusqu'à présent, pour n'en nommer que quelques-uns, nous avons vu des campagnes pour défendre les fruits moches, des campagnes de collecte de déchets festifs (la cuisine est un acte d'amour), des restaurants spécialisés dans les déchets de cuisine (Silo), des chefs comme Dominique Crenn laissant tomber la viande de leurs menus (20 % de tous les déchets), Alexandre Silva de Loco utilise les déchets comme innovation et le mouvement du nez à la queue de cette année pour les fruits de mer prend de l'ampleur avec le chef Josh Niland à la barre. Même les cocktails s'y mettent avec "Trash Tiki" en utilisant des déchets alimentaires, des pelures et des ingrédients comme la pulpe de pomme et la peau d'orange.
Les déchets alimentaires sont une réalité de notre système alimentaire, et son sort, nous le prédisons, ne fera que s'aggraver, se renforcer et se mondialiser.
Vous pouvez d'ailleurs découvrir le site de notre journaliste Mathilde pour vous initier à l'anti-gaspillage alimentaire.