Et si je vous disais que le pain et son accompagnement peuvent être le binôme parfait pour un dîner en mesure de satisfaire les palais les plus exigeants, vous me croiriez ?
Ne craignez rien, moi aussi j’étais sceptique avant de rencontrer Alessandro Frassica, le chef toscan qui a fait du sandwich un style culinaire bien précis et qui contribue à sa littérature avec les livres Pan’ino de 2012 et Pan’ino Veggie de 2015, publiés par Guido Tommasi Editore.
‘Ino est la petite boutique de produits alimentaires et de vins que Frassica a ouvert en 2006 via dei Georgofili à Florence. Au cours des années elle s’est affirmée comme point de référence d’auteur pour ce genre alimentaire, en associant une attention spasmodique à la qualité des ingrédients (et au rapport direct avec les petits producteurs) à un travail constant de recherche créative.
La règle n° 1 de Frassica? Toutes les quatre variables du goût doivent être perçues distinctement à chaque bouchée du sandwich.
Aucun besoin de se trouver à Florence pour goûter les créations d’Alessandro Frassica car le chef possède à son actif de nombreuses collaborations dans toute la péninsule. À Milan, mentionnons celle avec Filippo La Mantia, qui propose dans son restaurant un menu sandwiches issu d’un mariage entre les saveurs siciliennes et l’habileté toscane. Si, en revanche, une approche plus holistique vous intéresse, sachez que l’Excelsior Hotel Gallia accueille depuis deux ans le chef pour de véritables leçons thématiques dans la cave à vin. Après l’excursus à travers les excellences culinaires du made in Italy de la dernière édition, consacrée justement au Tour d’Italie du Pan'ino, on explore en revanche cette année l’univers des sandwiches de mer et de terre, celui des grands classiques du sandwich, celui des sandwiches piquants et enfin celui des sandwiches veggie.
Chaque leçon se compose d’une introduction aux farines et au pain, suivie par une explication des ingrédients s’attardant particulièrement sur les sauces, et d’un approfondissement sur les assortiments possibles à la recherche de l’équilibre final (et oui, à la fin on le déguste même).
C’est justement au cours de l’un de ces rendez-vous que j’ai pu changer d’opinion sur la dignité du sandwich en tant que protagoniste d’un dîner entre amis. Les cinq recettes suivantes en témoignent, pour un menu complet du hors-d’œuvre au dessert:
SANDWICH AU STEAK TARTARE
Il vous faut une baguette de farine moulue sur pierre et de la levure mère – pour le chef uniquement celles de la boulangerie Davide Longoni -, du bœuf battu au couteau avec de l’oignon et des câpres, et une émulsion de jaunes d’œuf, d’huile et de citron. Oui, une mayonnaise, mais faite rigoureusement sur le moment. Le pain doit être bien grillé des deux côtés et une couche généreuse de sauce devra être tartinée sur chacun d’entre eux. Lorsque le steak tartare sera introduit au milieu, vous pouvez couper le sandwich en portions et le servir.
SANDWICH AU SAUCISSON FINOCCHIONA
Grand classique toscan, ce saucisson doit son nom à la tradition ancienne d’utiliser les graines de fenouil pour masquer la saveur rance de la viande quand elle devenait périmée. C’est le protagoniste de cette recette avec un type spécial de Pecorino toscan – qui est tout d’abord recouvert d’huile et puis passé dans un hachis de sauge, menthe, sarriette, basilic, romarin et coriandre – et une compote relevée de poivron rouge. Le pain parfait pour cette recette est le « filone » toscan, légèrement grillé, couvert de sauce, farci de finocchiona et de pecorino, coupé en portions et servi.
SANDWICH À LA « PORCHETTA » (COCHON DE LAIT RÔTI AU LARD ET AUX ÉPICES)
Pour cette recette également vous avez besoin d’un « filone » toscan mais à base de farine de tumminia, nécessaire pour souligner la saveur des autres ingrédients. Le sandwich est complété par deux couches généreuses de gorgonzola doux, de la « porchetta » sans couenne et coupée très fine et une cuillérée généreuse de figues de Carmignano confites au vinaigre aromatisé. Le pain est légèrement grillé, le reste des ingrédients est utilisé froid.
SANDWICH À LA CÔTELETTE
L’hommage milanais du chef. Il vous faut des côtelettes de veau, fines et désossées, panées uniquement avec de la farine de maïs afin d’éviter la redondance avec le pain qui sera ici aussi une baguette bien grillée. L’élément végétal du sandwich est offert par les pousses de navet, qui devront être blanchies, passées à la poêle avec les anchois et tenues de côté pour composer le sandwich. Dans la même poêle « sale » faire bien chauffer les côtelettes. On recouvre le pain grillé avec une émulsion à base de blanc d’œuf et d’huile et de citron, on recouvre avec les pousses de navet et on ajoute enfin les côtelettes. Dès que le sandwich est composé on le coupe en portions et on le sert à table.
« BRUSCHETTA » SUCRÉE
Pour terminer en beauté, on grille du pain noir et, encore chaud, on le recouvre de ricotta fraîche de vache. Une coulée généreuse de miel mille fleurs et des morceaux de noisettes feront le reste. À la place du miel du chocolat fondu, noir à 75%, est excellent.