Depuis le 9 novembre, le restaurant éphémère ADMO a pris vie au sommet du Musée du Quai Branly. A sa tête, on retrouve un trio qui manquait déjà à la scène gastronomique parisienne : Alain Ducasse, Romain Meder et Jessica Préalpato. Mais ce n’est pas tout ! La carte de cet établissement destiné à n’exister que cent jours est complétée par la patte culinaire du célèbre chef espagnol Albert Adrià, et les suggestions de Vincent Chaperon, chef de cave de Dom Pérignon. Fine Dining Lovers vous dit tout sur ADMO, de la naissance de ce projet complètement fou à la fusion de ces chefs aux univers très différents.
“Tu veux t’amuser ?”
Si cette collaboration a pu paraître soudaine et inattendue pour beaucoup, elle trottait en réalité dans la tête d’Alain Ducasse depuis plusieurs années. “Le chef est venu dîner dans mon restaurant Tickets à Barcelone il y a environ deux ans et demi, avant le début de la pandémie”, nous raconte Albert Adrià. “Déjà à l’époque, Alain Ducasse me disait que je devrais monter un projet à Paris”, se souvient-il. Une idée qui n’a depuis pas quitté l’esprit du chef le plus étoilé du monde et s’est finalement concrétisée en juin 2021. “A cette époque, je venais de quitter le Plaza Athénée et Albert devait fermer ses différents restaurants espagnols à cause de la crise sanitaire. Je l’ai appelé et je lui ai demandé ‘Tu veux t’amuser’” ? Il n’a pas hésité une seconde”, nous relate Alain Ducasse.

La Naturalité comme fil conducteur
Très vite, l’idée d’un restaurant éphémère sur les toits du Musée du Quai Branly émerge, les équipes se rencontrent et la fusion se crée entre les cuisines d’Albert Adrià et Romain Meder, ancien chef du Plaza Athénée avec qui Alain Ducasse avait imaginé la Naturalité. Ce concept “reste d’ailleurs la ligne directrice de la carte d’ADMO”, nous confie Romain Meder. “Je suis le chef invité, donc c’est à moi de m’adapter”, abonde Albert Adrià.
Si les débuts de la collaboration furent compliqués, tant les cuisines de l’un et de l’autre sont différentes, les deux univers ont fini par se rencontrer assez naturellement. “En fait, nous avons deux approches presque opposées pour créer un plat”, détaille Romain Meder. “De mon côté, je pense d’abord au produit et ce que je peux en faire. De son côté, Albert réfléchit à l’expérience client. Mais au final, nos chemins ont fini par se croiser.”
Une explication qui fait sens au moment de goûter les plats du duo, tant il est difficile de déceler qui a fait quoi. “C’était le but”, s’amuse Romain Meder. “On ne voulait pas que l’un crée un plat et l’autre le suivant. Les clients auraient passé leur temps à comparer les choses au lieu d’apprécier le moment.”
Mole et saucisse d'huîtres

Les deux chefs ultra-créatifs ont ainsi organisé plusieurs sessions où chacun préparait un plat de son côté avant de le faire goûter à l’autre pour trouver des pistes d’amélioration. “Le premier plat qu’Albert m’a présenté était le mole (sauce mexicaine au goût très prononcé) servi sur une patate douce. J’ai trouvé la sauce incroyable et j’ai suggéré de plutôt l'accompagner d’un chou-fleur cuit comme une viande et d’un foie de lotte. Le déclic s’est vraiment fait à ce moment-là”, se réjouit Romain Meder.
Sont ensuite nés d’autres plats empreints de Naturalité et d’originalité comme ce pain moelleux à la saucisse d’huître et wakamé, cette peau de morue travaillée comme des nouilles soba dans un bouillon champignon et oursin ou encore le vesce (légumineuse considérée comme un engrais vert) servi en salade et émulsion avec une poudre d’échalote au vinaigre et une pâte de shekwasha.
Côté pâtisserie, Jessica Préalpato, élue meilleure pâtissière du monde en 2019 n’a rien perdu de sa superbe, avec une explosion de saveurs entre la mandarine le sésame noir et huile d’olive, ou des créations plus régressives comme cette confiture de lait cru, faisselle, glace au lait réduit, kéfir de lait et caillé séché râpé.
Bien évidemment, la carte d’ADMO devrait évoluer au fil des cents prochains jours sous l’impulsion créative des chefs. “On a déjà plein d’idées”, nous lâche Romain Meder, tout sourire, qui n’a comme toujours qu’une limite : celle de la saisonnalité.
Où ? ADMO, Les Ombres au Musée du Quai Branly - Jacques Chirac, 27 quai Branly, 75007 Paris.
Prix : 380€ le menu, hors boissons.
Crédit photo : ©PhilippeVauresSantamaria