Passer la porte de La Maison d'à Côté, c'est découvrir l'univers unique de Christophe Hay. Fraîchement couronné de deux étoiles au Guide Michelin, le chef a fait de son restaurant un lieu très identitaire, emprunt de modernisme et de sérénitude.
La passion des poissons d'eau douce
Dans cette grande pièce aux teintes bleutées rappelant l'eau de la Loire, Christophe Hay et sa femme Emmanuelle offrent un cadre à leur image : calme et apaisant, sans pour autant nous endormir. Il faut dire que dans l'assiette, le chef originaire du Loir-et-Cher envoie ce qu'il faut pour vous destabiliser sans jamais vous faire perdre l'équilibre.

Au fil des services, Christophe Hay sublime son terroir, avec tout d'abord la mise en scène des poissons de Loire, pêchés par Sylvain Arnoult. Mulet, anguille, silure... Le chef doublement étoilé s'amuse avec des espèces que les clients n'ont pas forcément l'habitude de consommer provoquant la surprise dans la découverte. On retiendra notamment le brochet et sa peau croustillante accompagné de laitue seltuce travaillé comme une asperge, ou la carpe à La Chambord avec sa réconfortante sauce au vin et lamelles de truffe, mais également des espèces méconnues comme le rotengle, un poisson oublié qui vaut largement la peine d'être découvert, tant sa chair est moelleuse. Mais le plat iodé qui nous a sans doute le plus marqué reste le sandre confit à la cire d'abeille d'une rondeur et d'une gourmandise sans nom.

Le boeuf wagyu français
Mais Christophe Hay ne fait pas du poisson son combat unique. Ce fils de boucher, fervent défenseur de l'environnement, a récemment fait l'acquisition d'un cheptel de 27 boeufs Wagyu que son ami Yvan Derfoir élève près d'Angers. "Cet élevage, ce n'est pas un coup de com'. Je baigne dans cet univers agricole depuis tout petit et je le fais par amour et conviction", martèle le chef.

De leur naissance jusqu'à leur 36 mois, ces boeufs sont nourris au lin et élevés en prairie. Durant les six derniers mois, ils sont massés par des brosses mécaniques en musique, afin de les détendre au maximum. Résultat : une viande persillée et particulièrement fondante que le chef sert en toute simplicité avec de la pomme de terre, des oignons nouveaux et de la moutarde... Explosion d'umami assurée !
Le jardin en permaculture
Si Christophe Hay voue une passion débordante pour le poisson et la viande, le chef sait parfaitement qu'un plat n'est rien sans un bon légume, des herbes fraîches ou encore des fleurs comestibles de qualité. "Il y a vingt ans, quand on imaginait un plat, on pensait à la protéine en premier. Aujourd'hui, on pense au végétal d'abord", souligne-t-il. C'est pourquoi, il y a déjà quelques années, le Ligérien a fait appel à Alain Gaillard pour s'occuper de son jardin en permaculture, situé à quelques mètres seulement de La Maison d'à Côté. Chaque jour, ce dernier chouchoute les cultures pour proposer au chef et ses équipes les meilleurs produits qui viendront colorer et animer les assiettes du restaurant doublement étoilé.

Crédit : Mathilde Bourge
Si le temps vous le permet, allez donc faire un tour dans ce potager ouvert à tous. Alain se fera sans doute un plaisir de vous présenter les dizaines de variétés du jardin, parmi lesquelles des plantes surprenantes comme l'armoise cola au goût - comme son nom l'indique - de cola, que les pâtissiers s'amusent à transformer en coulis pour réveiller un dessert, ou encore la santoline à l"odeur surprenante d'olive noire. Mais le soir de notre venue, c'est surtout l'utilisation de ces nombreuses herbes et fleurs sauvages sur une mousse de chèvre qui nous a envoûté par sa poésie.
La Maison d'à Côté : une dimension familiale

Crédit : Mathilde Bourge
La sérénitude de Christophe Hay se lit sur son visage mais aussi dans sa cuisine, complètement ouverte sur la salle. Aucun cri, aucune dispute n'émane des fourneaux, qui se muent en véritable pièce de théâtre pour ceux qui souhaitent réserver la table installée en bout de plan de travail. Le balai des chefs s'active tout au long du repas dans un calme olympien. "C'est à moi d'apporter cette zénitude", assure Christophe Hay. "Je suis quelqu'un de très posé, je n'aime pas les gens qui s'énervent autour de moi. Pendant un service, ce n'est pas possible ! Il faut que tout soit fluide pour que les choses se passent le mieux possible. Quand t'es cuisinier, tu as une amplitude horaire importante, la chaleur à supporter et le stress de bien faire, donc si tu y apportes de l'énervement tu finis complètement dézingué !"

C'est sans doute pour cette bienveillance environnante que la plupart des employés, comme le chef sommelier Sébastien Durance, restent fidèles à Christophe Hay. "On est une véritable équipe. Il y a une belle cohérence entre la salle, la cuisine et la pâtisserie", assure le jeune homme, en poste depuis 2014. Ce dernier vous suggèrera très certainement de goûter aux cuvées spécialement réalisées pour La Maison d'à Côté : Lisy, un vin blanc fleuri portant le prénom de la première fille de Christophe et Emmanuelle Hay, puis le Maelys, un vin rouge de Touraine du nom de leur seconde fille. "La famille a toujours occupé une place très importante dans ma vie", nous raconte Christophe Hay. "Quand j'étais petit, il n'y avait pas un week-end où on ne voyait pas mes grands-parents maternels. On se réunissait autour d'une grande table pour partager un bon repas à la ferme. Je n'ai malheureusement plus la possibilité de faire cela avec ma vie professionnelle mais j'ai envie de partager cet état d'esprit avec mes équipes, qu'ils se sentent en famille et préservés." Une douceur de vivre qui se ressent jusque dans l'assiette, marquante et percutante, dont on se souviendra longtemps !
Où ? La Maison d'à Côté, 25 roue de Chambord, Montlivault.
Crédit photos : Julie Limont