« Quand j’étais à l'école de cuisine il y a 37 ans, tous les chefs étaient français, pas québécois, » raconte le chef Normand Laprise dans son restaurant Toqué! à Montréal, Le Québec. « Et il nous ont très bien formés. » La mission culinaire de ce chef Relais & Châteaux ? Cuisiner aussi local que possible. D’ailleurs son livre de cuisine est un véritable hommage aux fermiers et producteurs. À l’époque où il apprenait à faire une béarnaise ou une béchamel, le concept de manger local était bien loin dans les restaurants québécois. Tout venait de France : le poisson, la viande et les légumes arrivaient congelés à Montréal et étaient diffusés dans tous les plus grands restaurants de la province.
Lorsqu’il a ouvert son premier restaurant à Montréal il y a 25 ans, Laprise voulait aussi soutenir les producteurs locaux et s’assurer d’être fourni en produits de haute qualité de leur part. Le Toqué!, ouvert en 1993, a suivi le même exemple. « Pour moi travailler local c'est d’abord pour la fraîcheur, » dit-il. Sa viande d’agneau vient de Rimouski, ses pommes Ambrosia viennent de St-Paul-d’Abbotsford et son cidre issu de l’agriculture biologique vient de Frelighsburg. Même dans un pays où les hivers glaciaux peuvent durer jusqu’en avril ou en mai, il y a toujours des tubercules, et des viandes fraiches disponibles, sans oublier les fruits que la brigade en cuisine transforme en sirops, confitures, cornichons et d’autres conserves.
La philosophie de Laprise a inspiré une légion de chef québécois locavore, dont Martin Picard du restaurant Au Pied de Cochon, Stéphanie Labelle de Pâtisserie Rhubarbe et Charles-Antoine Crete du tout nouveau La Majestique. « Maintenant il y a des jeunes chefs venus de tout le Québec et du Canada dans les cuisines, pas que des français, » raconte Laprise, qui fait partie d’un grand réseau de chefs qui revendiquent maintenant les produis locaux sur la scène de Montréal, qui inclut Derek Dammann de la Maison Publique, David McMillan et Fred Morin de Joe Beef, Liverpool House et Le Vin Papillon mais aussi Claude Pelletier du restaurant Le Club Chasse et Pêche, Le Filet et le Serpent.
Quels sont les futurs projets pour le chef canadien ? « J’ai plusieurs propositions pour ouvrir quelque chose dans la campagne, un restaurant ou une auberge par exemple, » dit-il. « Mais si je fais ça, je voudrais faire quelque chose d’urbain dans la campagne, comme le Fogo Island Inn en Terre Neuve. » Pour arriver jusqu’à cette île isolée, les visiteurs doivent prendre un avion, une voiture et un ferry pour se retrouver dans une suite dans un hôtel boutique avec beaucoup de paix et de tranquillité, et une vue spectaculaire sur l’Océan Atlantique. « C’est vraiment sauvage là-bas. Pour moi une structure très moderne au milieu d’une contrée sauvage peut très bien marcher à condition qu’il n’y ait pas d’autres structures extravagantes autour. Juste une au milieu de nulle part c’est bien – c’est vrai. Et je pense que c’est bon pour la région, » dit-il. « Si je devais retourner dans la campagne, j’aimerais aller dans un endroit comme à Saint-Alexandre-de-Kamouraska, où je suis allé quand j’étais plus jeune. C’était très sauvage à l’époque aussi. »