A 36 ans, Romain Meder s’est tracé une belle et longue route qui l’a conduit derrière les fourneaux du Plaza Athénée à Paris. Après une période de fermeture, le célèbre restaurant d’Alain Ducasse a ouvert ses portes l’automne dernier, et a fait appel à Romain Meder pour occuper la position de sous-chef au sein du nouvel univers de Ducasse. Sur la scène du congrès de cuisine d’auteur Identità Golose à Milan, le chef a préparé un plat pour exposer le concept de « haute cuisine mediorientale » : quinoa, légumes et truffe. L’illustration d’un objectif que Romain Meder et Alain Ducasse se sont donnés au Plaza Athénée : créer une cuisine plus naturelle, avec plus de légumes et de céréales et moins de viande et de poisson.
Comment avez-vous commencé à travailler pour Monsieur Ducasse ? Avant l’an 2000, j’avais travaillé dans plusieurs endroits à Paris, mais je voulais retourner dans un milieu gastronomique, au sens propre du terme. J’avais travaillé dans l’ancien Plaza Athénée comme chef de partie pendant quatre ans avant de travailler dans La Cour Jardin, toujours du Groupe Alain Ducasse. Mais j’avais aussi très envie de partir, de voyager et de découvrir autre chose.
Et c’est donc ainsi qu’ont commencé vos voyages… J’ai travaillé pour le Spoon des Iles, à l’Ile Maurice pendant deux ans et demi. Et puis je pense que mon travail a plu puisque je me suis retrouvé à l’Idam de Doha, au Qatar, comme chef de partie. J’ai contribué à l’ouverture du restaurant depuis le début : il n’y avait qu’une page blanche sur laquelle il fallait écrire. Ouvrir un restaurant français dans le Moyen-Orient était un grand défi.
Mais Monsieur Ducasse vous a aussi envoyé dans d’autres endroits… Au Maroc, à Mumbai, à New York, au Liban : pour apprendre, pour voir comment utiliser les épices, qui ne sont pas très présentes dans notre culture gastronomique, mais aussi pour travailler d’autres ingrédients « étrangers » à la tradition française comme les pois chiches. Et en général , je me suis laissé inspirer par le Moyen-Orient. Après le Qatar je suis revenu pour le plus grand défi de ma vie : faire partie de la réouverture du Plaza Athénée.
Comment s'est passé le retour au travail à Paris ? C’est certainement plus facile pour trouver des producteurs ! Il y a des centaines de petits producteurs à Paris et en France avec lesquels on peut rentrer plus facilement en contact et rencontrer en personne. Au Qatar, s’il y avait un bon agriculteur qui cultivait des tomates, tout le monde se précipitait vers lui.
Une bonne partie de vos légumes viennent de votre jardin de Versailles… Dans les jardins de Versailles, il y a un potager que la reine Marie-Antoinette avait fait construire comme son refuge « bucolique ». Alain Ducasse a signé un accord pour le remettre en état pour qu’on puisse le cultiver et il est désormais vivant : les jardiniers sont vraiment bons, et non utilisons tous ces petits légumes. Une sélection potagère vraiment incroyable. Les légumes sont fondamentaux dans notre cuisine.
Lequel préférez-vous ? Celui de la saison présente, celui qui sera de saison dans un mois, celui qui était de saison le mois dernier. Aujourd’hui le navet, demain l’asperge. Ce que la nature peut et veut donner.
Est-ce que les changements du menu ont été difficiles à gérer pour les clients ?
Nous les avons faits petit à petit, personne n’a été trop frappé par ces changements. Nous avons encore de la viande, mais nous voulons expliquer d’où elle provient, et nous avons encore des produits de luxe qu’on équilibre avec des produits « pauvre », par exemple, le quinoa et la truffe, ou le caviar et les lentilles.
Quel est le secret de la réussite d’un restaurant ? Chaque restaurant a essentiellement une histoire humaine, que nous nous limitons à raconter chaque jour. L’histoire des chefs, mais aussi des artisans qui fabriquent les assiettes, les verres, les lampes, des agriculteurs et des pêcheurs. Nous voulons pouvoir trouver un nom et un visage derrière chaque pièce.