Anthony Orjollet, chef du restaurant Elements à Bidart, est un pro du taloa. D'ailleurs, pas un jour ne passe sans qu'une recette ne soit à la carte, qu'elle soit à base de viande ou même vegan.
Mais au fait, qu'est-ce que le taloa ? Anthony Orjollet nous dit tout sur cette galette de maïs du Pays Basque et sur ses secrets de fabrication.
Qu'est-ce que le taloa ?
Le taloa est une galette de maïs qui ressemble à un taco de maïs, une tortilla version basque. Les Mexicains font ce qu'ils appellent une "masa" dont la texture est différente, mais nous utilisons le même procédé aztèque.
Pour le réaliser, j'utilise de l'eau, parfois du piment d'Espelette, mais surtout du maïs basque Grand Roux qui avait disparu et qui a été retrouvé il y a quelques années dans un monastère avant d'être replanté et redéveloppé par différents agriculteurs du coin. Personnellement je travaille avec le maïs de Jon Harlouchet à Bussunarits près de Saint-Jean-Pied-de-Port.
Ton secret réside donc dans la qualité de ce fameux maïs ?
Chez Elements oui. On travaille exclusivement avec ce maïs local et nous avons notre propre moulin pour en faire de la farine fraîche. On mixe d'abord le maïs, on le cuit dans une solution alcaline et on le laisse reposer dedans. Tout ce procédé maison inspiré de la Nixtamalisation nous permet d'améliorer nettement la texture. Si on mélangeait simplement de la farine avec de l'eau, on obtiendrait un résultat assez sec. Ici, on a un taloa bien moelleux avec un bon goût de maïs et parfois des couleurs différentes, car nous utilisons une seule variété de maïs mais qui présente différentes nuances de couleurs, du bleu au violet en passant par le jaune clair, foncé ou ocre. Enfin, le dernier avantage de ce procédé maison est que l'on garde un peu de son (enveloppe du maïs) et donc plus de valeurs nutritionnelles - acides aminés, vitamine B3, phosphore.
Le taloa est donc sans gluten ?
Chez Elements on a en effet un taloa sans gluten mais ce n'est pas toujours le cas ailleurs, car souvent les établissements coupent avec de la farine de blé. Au Pays Basque français, je ne connais pas d'autres restaurants qui travaillent comme nous ; côté espagnol, je pense qu'on trouve plus de taloa 100% maïs mais ils sont souvent plus épais, plus rustique... Ils ressemblent plus à du pain qu'à une galette.
Comment prépares-tu le taloa chez Elements ?
On prépare la "masa" chaque jour, on met du piment, du sel, on presse et on cuit minute. Ensuite, on garnit de poitrine de cochon ibaïama croustillant, de légumes fermentés, de "fromage" de noix de cajou, de piment fermenté, de vinaigrette aux racines fermentées et de légumes frais. On propose aussi un taloa vegan avec des légumes à la braise, fermentés et frais, ainsi que de la salade, des sauces maison et des condiments. Ces deux taloas sont constamment à la carte. Parfois, on en rajoute un au poulpe ou à la queue de boeuf désossée suivant la période de l'année.
A part chez Elements, où est-il possible de manger un bon taloa ?
A Paris on peut aller au restaurant A.Noste de Julien Duboué. Sinon, j'en ai mangé de très bons dans les fêtes de village côté espagnol, à Saint-Sébastien et aussi pendant la fête du piment d'Espelette (en octobre).
As-tu une petite recette à nous dévoiler ?
Malheureusement, comme nous avons nos propres fournisseurs et notre moulin, il n'est pas possible de refaire notre recette de taloa à la maison. Mais je sais qu'il y a la recette du restaurant Haraneko Borda (Itxassou) dans le livre Cuisine Basque - à noter que cette recette n'utilise pas le même procédé de nixtamalisation.