Alors que le sucre est de plus en plus boudé par les grands chefs pâtissiers, qui lui préfèrent des alternatives comme le miel ou le sucre naturel des fruits, Julien Allano va encore plus loin. Le chef, qui ouvrira au printemps 2024 son premier restaurant JU - Maison de cuisine à Bonnieux dans le Luberon, a décidé de concocter lui-même son “miel” à partir de céréales locales.
“Je m’inspire d’une préparation coréenne, appelée Jocheong (catalogué par la fondation Slow Food comme étant en “danger de disparition”)”, débute Julien Allano. “Je cherchais une alternative au sucre, qui est une industrie très polluante (même si les choses tendent à s’améliorer) et je suis tombé sur la fabrication du sucre d’orge. J’ai fait quelques tests en suivant des tutos sur internet et ils ont été très concluants”, se réjouit-il.
Souvent comparé au miel, ce sucre d’un autre genre ne nécessite aucune abeille. En Corée, il est constitué de trois ingrédients : une céréale (généralement du riz), du malt d’orge et de l’eau. Pour coller à sa philosophie du “consommer local”, le chef utilise de l’épeautre ou du maïs pour mijoter sa propre recette.
La fabrication du “miel” de céréales
Pour réaliser ce “miel”, il suffit de “concasser les céréales assez finement, les plonger dans quatre fois leur volume d’eau et de cuire entre 70 et 80°C. Quand le mélange retombe à environ 60°C, on ajoute l’orge malté et une réaction chimique s’opère, la liquéfaction est presque immédiate. On travaille la matière de 4h à 6h à 65°C jusqu’au déphasage. On récupère alors le liquide que l’on fait réduire comme une confiture, jusqu’à obtenir la bonne densité”, explique Julien Allano, qui précise qu’il conserve la matière sèche pour en faire une poudre d’assaisonnement sucrée.
“Dit comme ça, on peut avoir l’impression que c’est très énergivore. Mais en réalité, mon passe chauffe pendant plus de trois heures, avant et pendant le service, alors j’optimise la chaleur générée”, justifie-t-il.
Crédit : Florian Domergue
Un sucre de céréales pour des plats et desserts
Julien Allano produit jusqu’à présent deux sucres de céréales distincts : un à l’épeautre, assez opaque et dense, et un second au maïs, plus clair et sucré. En plus d’être local, ce “miel” de céréales se digère plus lentement qu’un sucre classique, ce qui réduit les pics d’insuline. “Pour le reste, ce n’est pas forcément mieux ou moins bien que le sucre. Disons que ça correspond simplement à ce que j’ai envie d’offrir à mes clients”, avoue Julien Allano.
Si son restaurant JU - Maison de Cuisine n’a pas encore ouvert ses portes, le chef a bien évidemment déjà imaginé deux recettes mettant en avant ces sucres naturels. La première est une salade, généralement de la puntarelle ou de la trevisana, grillée puis laquée avec du sucre d’épeautre pour adoucir l’amertume. “J’ajoute des zestes de citron, quelques feuilles de menthe, un peu de pomme acide pour la fraîcheur et quelques graines d’épeautre torréfiées. Ça donne un joli panel de goûts et de textures”.
Crédit : Florian Domergue
La seconde est un dessert entièrement imaginé autour du maïs, en hommage à ses moments passés en famille à regarder un film en dévorant du pop corn. “Pour cette recette, je prépare du pop corn que je caramélise avec le sucre de maïs, avant de le mixer avec un peu de crème et de lait. Je réalise aussi une glace vanille au sucre de maïs, quelques pop corns éclatés et de la poudre de maïs salée… C’est gourmand et réconfortant”, assure Julien Allano.
Pour découvrir le reste de ses créations, rendez-vous dès la fin du mois de mars-avril chez JU - Maison de Cuisine.
Où ? JU - Maison de Cuisine, 2 rue Lucien Blanc, 84480 Bonnieux