D'après le dernier avis du gouvernement, les restaurants français pourraient rouvrir leurs portes le 15 juin prochain. Si certains restaurateurs s'en réjouissent déjà, c'est loin d'être le cas de Victor Mercier.
Pour l'ancien finaliste de Top Chef, aujourd'hui à la tête de FIEF (Fait Ici en France) à Paris, les établissements ne devraient pas accueillir de public avant le mois de septembre. "Je trouve le manifeste du Collège Culinaire de France complètement ridicule. Faire une formation du personnel chaque matin, pendant une trentaine de minutes, pour rappeler les bonnes pratiques me paraît complètement lunaire. On va faire ça quoi... deux ou trois fois et après on va vriller ! Vous imaginez, répéter le même discours chaque matin pendant des mois, c'est n'importe quoi. Ils souhaitent également envoyer une vidéo aux clients pour les rassurer... Ce n'est pas une simple vidéo qui va le faire ! Quant au fait d'être transparent envers les clients concernant les produits et la méthode de production, pour moi c'est la base, et pas seulement en période de crise."
"Je comprends qu'on veuille rouvrir les restaurants mais plutôt que ces procédures d'un autre temps, il faudrait plutôt dire qu'on va mettre en place des plexi entre les clients, diviser notre capacité de 50% pour espacer les tables, que le personnel aura des masques et des gants... Ca, ça me paraît déjà plus réaliste." Cependant, ce n'est pas l'idée que se fait Victor Mercier d'un restaurant. "Vous vous imaginez entrer dans votre resto préféré avec les serveurs habillés en personnel médical (qui au passage fait un travail formidable) ? Notre métier n'est pas compatible avec la crise actuelle. Aller au restaurant est un moment léger, de bonheur, qui doit nous sortir du quotidien. Si on rappelle aux gens pendant leur dîner le cadre dans lequel on vit, ce n'est pas possible", estime le jeune chef.
De plus, Victor Mercier craint que rouvrir les restaurants trop tôt ne fasse plus de mal que de bien à la profession. "Si on ouvre le 15 juin, j'imagine que les gens viendront pour fêter la fin du confinement, fêter leur liberté, retrouver leurs proches... Mais en voyant des serveurs en blouse, avec des gants et des masques, je pense qu'ensuite ils préféreront se faire livrer pour manger tranquilles chez eux. Il faudrait un vrai plan spécifique de réouverture pour les lieux publics non essentiels, comme les restaurants, les bars, les boîtes, etc..."
"Je pense que c'est aussi irresponsable car rouvrir trop tôt nous expose à une deuxième vague car le virus, même s'il est en baisse, sera toujours là. J'ai peur qu'on fustige ensuite les lieux communs, comme les restaurants, les bars, les boîtes de nuit... Si les gens pensent que c'est à cause de ces endroits qu'il y a une rechute, on risque carrément le boycott", craint Victor Mercier.
"Aussi, concernant Paris, je pense que beaucoup de Parisiens voudront partir en vacances dans les régions cet été. Pour un restaurateur parisien, ça ne vaudra pas le coup de rouvrir pour une quinzaine de jours avant de voir la capitale se vider, et donc les clients partir."
"Dans l'idéal, j'aimerais ne rouvrir qu'en septembre voire en 2021. Mais ce n'est pas possible car nous avons tous des réalités économiques... Si à partir du 15 juin tous les plans d'aides financières sont coupés, je n'aurais pas d'autres choix que de rouvrir, mais je le ferai à contre coeur et quoi qu'il en soit, les conséquences seront dramatiques."