Julien Duboué a des projets plein de la tête. Le jeune chef, à la tête du restaurant A.Noste à Paris, va prochainement se lancer dans l'ouverture d'une nouvelle adresse, sortir un livre mais ne s'arrêtera pas là.
En effet, les idées fusent chez cet ancien candidat de Top Chef ! Aujourd'hui, dans son restaurant rue du 4 Septembre à Paris, le jeune homme au sourire infaillible et au franc parler, entame avec nous une conversation à bâton rompu sur son métier et ses envies. Et une chose est sûre, c'est que le chef n'a pas fini de nous surprendre !
La rentrée s'annonce chargée pour vous avec l'ouverture mi-octobre d'une nouvelle adresse entièrement dédiée à la farine de maïs bio, au sein de la Maison de l'Aquitaine. A quoi doivent s'attendre les Parisiens ?
Les clients pourront retrouver certaines choses que l'on propose déjà chez A.Noste, c'est-à-dire des saveurs du Sud. Je travaille depuis longtemps avec un ami du Pays Basque qui est producteur de farine de maïs bio et l'idée est de mettre en avant ce produit de chez moi que j'utilise sous toutes les formes.
Là-bas, les clients retrouveront tous les traceurs de la street food moderne : ça sera rapide, fait sur place, à partir de maïs bio et donc sans gluten, très sain... Le produit sera décliné sous une quinzaine de recettes, comme la polenta ou le Taloa (sandwich typique du Pays Basque).
Pour tout vous dire, je suis parti en vacances à New York et j'ai eu comme une inspiration. L'idée m'est venue là-bas, en me baladant et j'ai écrit le concept sur mon téléphone en 1 heure. Avant de m'emballer plus, j'ai regardé sur Internet si le concept existait déjà. Quand j'ai constaté que non, je me suis dit qu'il ne fallait pas que je tarde. Tout est une question de timing quand on a une idée nouvelle.
Au milieu : Soufflé au chocolat et à l'armagnac.
Vous sortirez également début octobre votre livre « Sud-Ouest » où vous présentez les producteurs de chez vous. Pourquoi avoir eu envie de leur rendre hommage ?
Dans le livre, il est question de producteurs avec qui je travaille, mais pas que. Il s'agit majoritairement de producteurs du label Qualité Landes. Le but est de les faire connaître à travers ce livre pour faire vivre les agriculteurs de mes Landes natales. Et même si je ne travaille pas avec eux, je les connais tous et je sais qu'ils font vraiment de bons produits.
D'ailleurs, d'où viennent les produits que vous travaillez chez A.Noste ?
80% de nos produits viennent du Sud-Ouest. Les légumes sont produits par mes parents et je parle d'eux dans le livre. Je prends les asperges chez un agriculteur de mon village natal, j'ai un ami d'enfance qui a repris la ferme de ses parents et on lui achète ses veaux, pareil pour un ami qui élève des cochons... Tout le monde est gagnant car moi je suis sûre de la qualité des produits et je suis ravi de les aider à vivre de leur métier. Alors bien sûr, c'est plus compliqué que lorsqu'on achète tout au même endroit car il faut passer des dizaines de coups de fil, faire plus de factures, mais j'adore travailler main dans la main avec ces gens-là !
Tous les journaux avaient annoncé un autre projet : l'ouverture à la rentrée d'un restaurant à Bordeaux. Finalement le projet est tombé à l'eau. Que s'est-il passé ?
C'est vrai que cela semblait bien parti. Je me suis rendu plusieurs fois à Bordeaux pour visiter une dizaine d'affaires et une m'a vraiment plu. C'était signé et finalement la personne avec qui je négociais s'est rétractée. Je ne perds pas espoir mais a priori les choses ne se feront plus là-bas.
Je ne vous cache pas que cela m'a un peu refroidi car je me suis beaucoup investi. Les choses sont allées beaucoup plus vite quand j'ai voulu m'installer à Paris. Là-bas c'est plus compliqué. Je ne laisse pas complètement tomber pour autant mais une fois de plus, je pense que tout est une question de timing. Beaucoup de chefs s'installent là-bas et j'ai l'impression que si les choses ne se font pas très vite, je vais louper le coche. Je n'aime pas avoir un train de retard !
Pourtant vous êtes du Sud-Ouest. Vous n'avez pas envie d'insister un peu plus ?
C'est vrai que ce projet correspondait totalement à ce que je voulais faire, c'est une belle ville et ça m'aurait rapproché de mon village, même si je ne serais pas allé vivre à Bordeaux. Mais aujourd'hui je me sens vraiment bien à Paris, cette ville est magique ! Et en tant que restaurateur, je peux me permettre d'avoir un rythme de vie plus cool, de ne pas travailler le week-end, ce qui serait impossible dans le sud.
Il y a un an, vous avez ouvert un corner à tapas, A-Mia, juste en face d'A.Noste. Quel est le bilan après une année ?
Les premiers mois ont été compliqués. Nous ne sommes pas très bien placés pour de la vente à emporter. On a vivoté au début et maintenant que la clientèle est constituée ça marche très bien. On est vraiment très contents !
Vous semblez avoir toujours de nouvelles idées en tête. Qu'est-ce qui fait qu'un jour vous vous décidez à vous lancer pour de bon dans un projet ?
Je marche à l'instinct. Je ne me dis pas « il faut que je fasse ça cette année, ça dans un an »... Je ne réfléchis pas vraiment au futur. Disons que j'ai toujours beaucoup d'idées de concept. En ce moment j'en ai 4 ou 5 en tête mais je ne me lance pas parce qu'il faut du temps, de l'argent et trouver de bons employés pour tenir tout cela après. Ca m'embête de ne pas pouvoir concrétiser tout ça mais je viens d'avoir une deuxième petite fille et il faut aussi faire attention à la vie privée. Je me suis fixé un projet par an, ce qui est déjà pas mal.
Vous avez travaillé au restaurant Le Cinq (3 étoiles) et également chez Daniel Boulud (2 étoiles) à New York. Que retenez-vous de ces belles expériences ?
Le Cinq c'était ma deuxième expérience à Paris. J'avais vraiment envie de voir le côté luxueux des palaces et ça m'a apporté de la rigueur et de la technique. J'étais chef de partie aux poissons et j'avais 5 personnes sous mes ordres donc ça m'a aussi appris à gérer une équipe.
Concernant le restaurant de Daniel Boulud, je voulais surtout aller à New York pour apprendre l'anglais. Au final je n'ai pas du tout appris car 50% de la brigade était française (rires). Mais c'était une super expérience, j'ai goûté à la vie américaine où tout va plus vite... A chaque fois que j'entrais dans une nouvelle maison en tant que commis, je voulais faire mes preuves et grimper les échelons. En France, ça me prenait environ deux ans. A New York, Daniel Boulud m'a proposé la place de sous-chef au bout de seulement six mois. C'était incroyable ! Mais je suis parti car l'atmosphère ne me correspondait pas vraiment. J'aime travailler dans une ambiance très amicale et bon enfant.
Au milieu : Croustillant de polenta au magret fumé. A droite : Rouleaux landais.
C'est le cas aujourd'hui dans vos différentes adresses ?
Tout à fait. Aujourd'hui, je fais très attention aux personnes que je recrute, je ne passe aucune annonce, c'est uniquement du bouche à oreille. J'ai une super équipe autour de moi ! Je fais confiance à tout le monde et il y a très peu de turn-over.
L'après-midi on va faire du sport ensemble, du squash, du foot, de la pétanque, paintball... J'ai fait beaucoup de rugby et je pense que ça m'a appris à avoir l'esprit d'équipe.
J'investis aussi mes équipes en cuisine en lançant des concours internes. Là il y en a eu un sur l'abricot où les apprentis devaient proposer une recette et on a voté. Le vainqueur a désormais sa création à la carte et je l'ai invité à dîner au Peninsula. Ca permet de les impliquer vraiment dans la vie du restaurant.
Avez-vous encore d'autres projets en tête dont vous aimeriez nous parler ?
J'en ai toujours, mais il n'y a rien de signer. Après l'histoire de Bordeaux, je n'ai pas envie de trop m'avancer. Mais je reviendrai vers vous quand les choses seront plus concrètes ! Une chose est sûre c'est que je me sens bien à Paris et c'est ici que je veux m'investir, ou sinon ça sera carrément à l'étanger.
Où ? A.Noste, 6bis rue du 4 Septembre, 2e arrondissement de Paris.
Web
Crédits photos : Guillaume Czerw
Recette extraite du livre Sud-Ouest - Un concentré de convivialité en 80 recettes, à paraître le 1 octobre 2016 chez Alain Ducasse Edition.
Auteurs : Julien Duboué, Philippe Boé
Photographe : Guillaume Czerw
Disponible en librairie au prix de 29€