Maxime Bouttier est un chef dans l'ombre. Ce jeune homme de 27 ans, tatoué et percé, est aussi grand que discret et pourtant, son travail chez Mensae mériterait amplement les feux des projecteurs.
Caché dans une petite rue du 19e arrondissement, ce restaurant avait fait beaucoup parlé de lui lors de son ouverture. Initié par le chef étoilé Thibault Sombardier et tenu à l'époque par Kevin d'Andrea, ce duo de Top Chef avait conquis le coeur - et l'estomac - des habitants du quartier mais aussi du Guide Lebey qui l'avait désigné meilleur bistrot de Paris en 2016.
Quelques temps plus tard, Kevin d'Andrea a quitté le navire et le chef Jun-Sik Cho est passé par là. Mais depuis début 2019, c'est donc Maxime Bouttier qui est aux commandes, toujours sous la houlette de Thibault Sombardier. "Je rentrais d'un long séjour à Tahiti qui avait un peu chamboulé mes habitudes de travail. Là-bas, on travaille pour vivre et non l'inverse. Dans le fond, les Tahitiens ont sûrement raison mais moi ça ne me convenait pas. À ce moment-là, un collègue d'un collègue m'a dit que Thibault cherchait quelqu'un pour Mensae et tout a commencé", nous raconte Maxime Bouttier.
À l'époque, le bistrot jouit d'une bonne réputation dans le quartier mais ne fait plus trop de bruit au-delà du 19e arrondissement. "Quand je suis arrivé, le système c'était 3 entrées, 3 plats et 3 desserts et quelques tapas qui changeaient au fil des saisons. C'était une bonne formule mais qui me frustrait beaucoup. J'avais pas mal de contacts de fournisseurs qui m'appelaient pour me parler de super produits que je ne pouvais pas mettre à la carte. Au bout de quelques semaines, j'ai dit à Thibault que je ne me sentais pas vraiment à ma place et que j'allais sans doute partir mais à ma grande surprise, il m'a dit que si je voulais changer les choses, j'avais carte blanche. Et là j'ai commencé à m'éclater en construisant cette nouvelle carte ! On a gardé la formule déjeuner bien sûr, mais le soir je pars plus sur de la bistronomie avec des produits d'exception, des belles pièces de viande à partager, des poissons rares... On propose aussi entre 7 et 9 tapas qui évoluent avec le temps. Le soir, c'est menu dégustation en cinq temps découverte, ou une formule entrée, plat, dessert à 39 euros."
Malgré son jeune âge, Maxime Bouttier a un style bien affirmé, une cuisine tout en finesse mais aussi audacieuse. Rien d'étonnant quand on s'intéresse un minimum à son parcours déjà bien fourni. Le chef de Mensae a en effet commencé la cuisine très tôt, à 14 ans, en suivant un BEP et débutant son apprentissage au restaurant L'Hoirie près d'Angers, avant de poursuivre à La Maison d'à Côté à Montlivault. "À l'époque, Christophe Hay n'avait pas encore repris cette affaire et le restaurant n'avait rien à voir avec ce qu'il est aujourd'hui." Le jeune homme est ensuite passé par le Grand Hôtel de Bordeaux puis un restaurant deux étoiles à Arles. "J'y suis resté presque un an. Ca a été l'expérience la plus dure que j'ai faite et je suis parti car la carte ne changeait quasiment jamais, donc je m'ennuyais." Mais pas question de prendre des vacances pour autant. Maxime Bouttier file à Cenon à côté de Bordeaux avant de tout envoyer valser. "J'ai pris mon sac à dos, mon vélo et je suis parti pour Londres. J'ai bossé au Taillevent pendant un an, c'était une super école pour le business et le management", se souvient le jeune homme originaire de la Sarthe.
Aujourd'hui, Maxime Bouttier semble avoir trouvé sa place chez Mensae. "Cette nouvelle formule nous a permis de fidéliser notre clientèle mais aussi d'en gagner une nouvelle qui vient de plus loin", se réjouit-il.
Grâce à ce système, le chef a pu renouer avec les producteurs qu'il afectionne et dont il respecte le travail depuis toujours. "Quand j'étais petit, j'habitais en campagne. Le bus scolaire me déposait au bout du chemin et au lieu de rentrer chez moi directement, j'allais à la ferme juste à côté et j'y restais pendant deux heures. J'aidais à faire les foins, la traite, nourrir le bétail... J'adorais ça ! Ca m'a donné envie de faire quelque chose de manuel car je ne tenais pas en place à l'école. Aujourd'hui encore, cette expérience me sert beaucoup car je connais le travail et le temps derrière tous ces produits donc j'en prends soin."
On vous parie qu'on entendra davantage parler de Maxime Bouttier dans les mois à venir...
Où ? Mensae, 23 rue Melingue, 75019 Paris.